Wisława Szymborska , l'auteur de l' "Eloge de la mauvaise opinion de soi" a surtout écrit ce monument : "Sous une petite
étoile"
poème qui n'en finit pas de poser des question (d'aporter des réponses ?)
Sous une petite étoile
Que le hasard m'excuse de le dire nécessité,
et qu'elle-même m'excuse si malgré tout j'ai tort.
Que le bonheur supporte que je le prenne sans façons.
Que les morts me pardonnent ces souvenirs fanés.
Et le temps, les univers manqués par seconde.
Pardon à l'amour ancien si le nouveau est premier.
Guerres lointaines, permettez ces fleurs dans le salon.
Plaies ouvertes, excusez mes égratignures.
Que les clameurs montant des abîmes pardonnent ce menuet.
Et les gens dans les gares - mon sommeil matinal.
Sois indulgent, espoir harcelé, laisse-moi rire parfois.
Oubliez, déserts, que je n'accoure avec une cuillerée d'eau.
Et toi, vieil épervier, toujours dans la même cage
fixant depuis des lustres le même point dans l'espace
veuille bien m'absoudre encore, fusses-tu empaillé.
Pardon à l'arbre abattu pour les quatre pieds de la table.
Pardon aux grandes questions pour les petites réponses.
Vérité, ne fais point trop attention à moi.
Gravité, j'implore ta miséricorde.
Souffre, mystère de l'être, que j'arrache des fils à ta robe.
Ne m'en tiens pas rigueur, âme, de ne t'avoir trop souvent.
Que me pardonne le tout de ne pouvoir être partout.
Que me pardonnent tous de ne pouvoir être chacun.
Je sais: tant que je vis, je n'ai aucune excuse,*
car je me fais ainsi obstacle à moi-même.
Pardonne-moi, langue, d'emprunter des mots pathétiques
et de faire l'impossible pour qu'ils paraissent légers.
*exact
(et pourrait-il me pardonner l'orang-outang enfermé dans le zoo d'Anvers, que j'ai vu dans sa cage et son épouvantable désespoir vers 1970 ? et me pardonnerait-il le Colley de Coat Forest ? pour ne pas parler de tout le reste)
C'est aussi celle qui a écrit ce poème aussi puissant que court
Je frappe à la porte de la pierre
- C’est moi, laisse-moi entrer.
- Je n’ai pas de porte, dit la pierre.